Après plusieurs mois d’attente , la décision est tombée le 17 mars dernier.
L’article 51 concernant les néonicotinoïdes a été adopté par 30 voix contre 28, interdisant ainsi, dans le cadre du « Projet de loi pour la reconquête de la
biodiversité
de la nature et des paysages »
l’utilisation de ces substances, à partir du 1er septembre 2018 sur l’ensemble des cultures (ainsi que l’utilisation des semences traitées avec ces produits).
Cette mesure, qui doit être confirmée en deuxième lecture au Sénat avant l’été 2016, prévoyait une entrée en vigueur au 1er janvier 2017. Mais il semble que la mise en place de « solutions de substitution » aux néonicotinoïdes, prévue dans le texte de loi prendra plus de temps que prévu.
Néonicotinoïdes : pollinisation et environnement
Les néonicotinoïdes sont des insecticides qui agissent sur le système nerveux central des insectes pour les désorienter et les repousser. Ils sont utilisés dans l’agriculture pour lutter contre les insectes considérés comme « nuisibles ».
Le problème principal des néonicotinoïdes est leur toxicité qui porte atteinte à l’environnement, notre santé et surtout aux premiers insectes pollinisateurs : l’abeille et le bourdon. Il y aurait aujourd’hui « plus de mille enquêtes scientifiques à charge contre » les néonicotinoïdes . L’analyse dont fait part le porte-parole de l’Unaf (Union nationale de l’apiculture française), Henri Clément, est que l’arrivée des néonicotinoïdes en 1994 en France, correspond au début du déclin des colonies d’abeilles : « environs 30 000 colonies d’abeilles domestiques périssent chaque année ». Parmi les nombreuses molécules en cause, les apiculteurs visent principalement l’imidaclopride, qui se diffuse actuellement rapidement dans l’environnement et qui serait « 7297 fois plus toxique que le DDT » (organochloré aux propriétés notamment insecticides qui fut interdit en France en 1971, car démontré cancérigène et
reprotoxique
). De plus, une étude récente, publiée au début de l’année 2015 montre l’existence d’une attirance de l’abeille/bourdon vers les néonicotinoïdes : «
Lorsque des butineuses affamées pouvaient choisir entre une solution sucrée traitée à un néonicotinoïde et une non traitée, aucune des deux
espèce
s n’a évité la nourriture traitée,
[…].
De manière surprenante, les insectes préfèrent en fait les solutions traitées avec l’imidaclopride et le thiaméthoxame
[deux des néonicotinoïdes les plus répandus]
. »
Par ailleurs, abeilles et bourdons ne sont pas les seuls touchés : les prédateurs d’insectes, comme les oiseaux, semblent aussi atteints, ainsi que les vers de terre, les sols et nappes phréatiques et cours d’eau, et donc par voie de conséquence l’être humain.
Classée en 2008 au 50e rang des substances les plus détectées dans les cours d’eau français, l’imidaclopride est inscrite depuis 2013 au 15e rang.
Cette progression inquiétante a heureusement été prise en compte dans le vote positif de l’Assemblée Nationale du 17 mars dernier.
Il convient donc de considérer le vote de l’article 51 du projet de loi pour la reconquête de la
biodiversité
, de la nature et des paysages comme une bonne nouvelle, sans oublier cependant que la mise en application de cet article dépend maintenant de l’approbation du Sénat.
Notons enfin pour les plus avides de chiffres, que la
pollinisation
mondiale a été monétairement valorisée (hé oui !) à 153 milliards d’euros par an, l’équivalent du PIB du Portugal.
Un aspect qui n’a pas échappé aux citoyens français très soucieux du déclin des colonies d’abeilles. En effet, 5 pétitions lancés par des Organisations Non Gouvernementales sur le web, afin d’interdire les néonicotinoïdes, ont recueillis 650 000 signatures.
Voici donc une nouvelle initiative nous invitant tous à prendre une part plus active dans la gestion de notre environnement et à considérer la question de la préservation de l’environnement, de notre santé et de celle des abeilles, comme cruciale.
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